l'orthorexie nerveuse

Dans la triste famille des troubles du comportement alimentaire, vous connaissiez déjà certainement l’anorexie ou encore la boulimie. Depuis près de 20 ans, un autre trouble du comportement alimentaire se développe sournoisement, mais à une vitesse effrénée : l’orthorexie nerveuse. À première vue, on a tendance à croire que vouloir manger sainement ne peut pas faire de mal. Qu’on ne mange jamais TROP sainement. Pourtant si. Le désir de manger sainement peut devenir une réelle obsession et avoir de terribles conséquences. Dans cet article, nous allons voir ensemble ce qu’est l’orthorexie et comment la reconnaître. À plusieurs reprises, je me permettrai d’exposer mes réflexions personnelles sur l’orthorexie. Je ne prétends pas qu’il s’agisse de la seule manière de voir les choses.

 

L’orthorexie, c’est quoi ?

L’orthorexie est l’obsession de manger sain. Elle concerne de plus en plus de monde, soit près de 3% de la population Française. Bien que ce trouble du comportement alimentaire soit récent, il progresse à une vitesse inquiétante. L’orthorexie nerveuse se traduit par une peur panique des aliments perçus comme malsains et une volonté obsessionnelle d’ingérer une nourriture la plus saine possible. En général tout commence avec un régime « sans », qui prend peu à peu une ampleur considérable. Par exemple et chez certaines personnes vulnérables, le végétarisme devient véganisme, puis crudivorisme, etc, etc. Ceci n’est qu’un exemple, ça ne veut pas dire qu’un régime d’exclusion débouche forcément sur l’orthorexie.

 

Quelles sont les causes possibles de l’orthorexie nerveuse ?

 

l'orthorexie nerveuse

 

L’orthorexie nerveuse naît, en général, d’un ensemble de facteurs qui créent la confusion et mènent à des conduites extrêmes :

 

Peur de l’empoisonnement

La peur de l’empoisonnement a toujours accompagné l’acte de manger. L’orthorexie nerveuse peut être perçue comme un réveil de cette crainte profonde. Crainte ravivée successivement par plusieurs traumatismes récents : vache folle, grippe aviaire, etc.

 

Volonté de vivre toujours plus longtemps et peur de la maladie

Le grand public est désormais conscient du lien qui existe entre nutrition et santé. Dans le même temps, les maladies de civilisation sont en totale explosion. De plus, les messages alarmants sur l’alimentation sont de plus en plus nombreux : dangers des produits laitiers, du gluten, des additifs, du sucre, du sel, du gras, etc, etc. Ces trois facteurs mis ensemble créent une confusion des plus totale et pousse les individus vulnérables vers des conduites alimentaires déviantes.

 

Révolte contre l’industrie agro alimentaire et désir de contrôle

Depuis quelques années, on assiste à une véritable révolte contre l’industrie agroalimentaire. Utilisation de pesticides, additifs dangereux, sucres cachés et publicités mensongères n’en sont que des exemples parmi tant d’autres, hélas. À moins d’avoir étudié la nutrition de près (et encore !), nous ne savons plus à qui faire confiance pour faire les bons choix alimentaires. Il y a, ajouté à cela, un sentiment général de perte de contrôle relative à l’acte de manger. Puisque de toute façon, on ne nous dit pas tout. Seulement ce qui est arrangeant. Cela va aussi avec l’allongement des circuits de production et la perte de lien entre le producteur et le consommateur. Nous sommes en perte de visibilité.

 

Le besoin d’identification par l’alimentation peut-il expliquer l’orthorexie nerveuse ?

L’identification par l’alimentation n’est pas récente. Depuis toujours on note des différences dans l’alimentation selon la classe sociale, la région du monde, les croyances, etc. Ce qui semble nouveau, c’est ce besoin obsessionnel et individuel d’identification. On ne cherche plus tant à appartenir qu’à se démarquer. On note donc une explosion du bio, du sans gluten, du sans lactose, du végétarien, du vegan, du cru, du fléxitarien, et j’en passe ! Explosion qui ne va plus forcément avec de réelles croyances, mais avec un besoin de se définir en tant qu’individu au travers d’un régime alimentaire particulier.

 

À mon sens, ce sont toutes ces raisons combinées qui rendent chacun d’entre nous vulnérable face aux troubles du comportement alimentaire. Et à l’orthorexie nerveuse particulièrement.

 

Orthorexie et réseaux sociaux

 

l'orthorexie nerveuse

 

De plus en plus, on entend dire que les réseaux sociaux sont de grands responsables de l’explosion des néo troubles du comportement alimentaire. Et de l’orthorexie en particulier. Certains parlent même de l’orthorexie comme étant « LA maladie des réseaux sociaux ». Est-ce si simple que ça ?

Si vous êtes sur Instagram, Snapchat, Pinterest et tous les réseaux en vogue ça ne vous a certainement pas échappé : l’attrait pour la nourriture belle et saine tourne à l’obsession. Attrait largement entretenu par les influenceurs et autres foodies qui délivrent une vision relativement « uniformisée » de l’alimentation. Ainsi, on assiste régulièrement à des modes et fixations qui prennent fin aussi vite qu’elles sont apparues : le smoothiebowl, le Poke-bowl, le bowl-cake, etc, etc. Tout en Bowl ! Il y a aussi eu la folie des sushis, de l’avocat, de la spiruline, etc. Si tout n’est pas à jeter, ces fixations éphémères traduisent aussi la relation tendancieuse qu’il peut y avoir avec l’alimentation. Relation complexe que l’on retrouve dans l’orthorexie.

Il faut aussi pointer du doigt que ces influences « healthy food » côtoient de près la foodporn (ou nourriture obscène) et les corps de rêve. Un amas d’informations contradictoires qui favorisent la survenue de troubles du comportement alimentaire. C’est en tout cas ce que révèle de récentes études.

 

Dangers et risques liés à l’orthorexie

 

l'orthorexie nerveuse

 

L’orthorexie nerveuse est un trouble du comportement alimentaire récemment reconnu comme tel. Ce trouble a donc, comme tous les autres, des conséquences parfois désastreuses pour la santé physique et psychologique de l’individu qui en souffre.

Premièrement, les orthorexiques souffrent souvent d’enfermement et d’isolement social. L’obsession de bien manger est telle que leur monde tourne autour de l’alimentation. Les sorties au restaurant deviennent impossibles, le lien social secondaire. L’alimentation sensée être conviviale et partagée devient un acte d’isolement.

Psychologiquement, l’orthorexie est très difficile à vivre. Comme tout autre trouble obsessionnel. Elle enferme l’individu dans un ensemble de routines qui conditionnent désormais sa vie toute entière. Les courses durent 3 heures, la température des aliments doit être vérifiée, ils sont souvent pesés, toutes les étiquettes sont lues scrupuleusement, les repas sont planifiés, etc. Il n’existe plus de place pour la spontanéité ni le plaisir.

Physiologiquement, l’orthorexie nerveuse peut avoir de très graves conséquences. L’éviction de nombreux groupes alimentaires à la fois peut entraîner des carences nutritionnelles graves en micronutriments. Il n’est pas rare pour un orthorexique de souffrir de malnutrition sévère s’accompagnant de fatigue intense, d’arrêt des menstruations chez la femme, de chutes de tension, de perte de cheveux, d’anémie, de diminution de la vue, de fatigue des reins, etc. L’orthorexie ne fait pas forcément moins de ravages que les autres troubles du comportement alimentaire.

Enfin, ce trouble récent est encore mal connu. Les personnes atteintes souffrent souvent de nombreux préjugés : manger sainement n’est pas une maladie, ce n’est pas si grave, c’est une lubie passagère, etc. Elles ont encore du mal à être prises en charge et accompagnées vers le chemin de la guérison.

 

Êtes-vous concernés par l’orthorexie nerveuse ? Faites le test !

 

l'orthorexie nerveuse

 

L’orthorexie est beaucoup plus fréquente qu’on ne le pense souvent. Et même si vous avez le sentiment d’être loin de tout ça, vous êtes peut être concerné. Vous ou un de vos proches. Pour en avoir le cœur net, je vous invite à répondre au test de Bratman. Le test de Bratman (je ne l’ai pas inventé !), est un outil de diagnostic reconnu pour dépister les comportements alimentaires à risques.

 

Il vous suffit de répondre aux 10 questions suivantes par oui ou non.

  1. Passez-vous plus de 3h par jour à penser à votre régime et votre alimentation ?
  2. Planifiez-vous vos repas plusieurs jours à l’avance ?
  3. La valeur nutritionnelle de votre repas est-elle, à vos yeux, plus importante que le plaisir de manger ?
  4. La qualité de votre vie s’est-elle dégradée alors que la qualité de votre alimentation s’est améliorée ?
  5. Êtes-vous devenu plus exigeant(e) avec vous-même ?
  6. Votre amour propre est-il renforcé par votre désir de manger sain ?
  7. Avez-vous renoncé à des aliments que vous appréciez dans l’optique de manger « sain » ?
  8. Votre régime alimentaire gêne-t-il vos sorties, vous éloigne-t-il de vos proches ?
  9. Éprouvez-vous de la culpabilité au moindre écart ? À la moindre entorse aux règles alimentaires que vous vous êtes fixées ?
  10. Vous sentez-vous en paix avec vous-même et avez-vous un sentiment de contrôle lorsque vous mangez « sain » ?

 

Une orthorexie peut être évoquée si vous avez répondu oui à 4 questions, ou plus. Si vous avez un doute, je vous recommande de vous rapprocher d’un professionnel de santé compétent.

 

En conclusion, l’orthorexie nerveuse est un trouble du comportement alimentaire récent exacerbé par une multitude de facteurs : scandales alimentaires, industrialisation de l’alimentation, réseaux sociaux, etc. L’obsession de manger sain peut être ravageuse et avoir de lourdes conséquences à long terme. Pour savoir si vous êtes concernés, faites le test de Bratman !

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